La Loi et l'Ordre dans les Mondes Imaginaires:
2ème partie: la procédure judiciaire
par M. Joseph Young
Où l’auteur examine les différentes manière d’attraper
– et de poursuivre en justice – un voleur.
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série ? Trouvez le ici |
Le droit définit la société et la société définit le droit ; et en
créant des mondes dans lesquels nos joueurs vivent leurs aventures, nous,
qui menons des parties de jeu de rôle, avons besoin d'une certaine
compréhension du droit qui sous-tend ces mondes.
Nous avons examiné comment les structures sociales et la construction du
droit sont liées. Mais l'apparition du droit, qu'il soit transmis par la
tradition orale, retranscrit sur des documents écrits, ou stocké dans des
bases de données électroniques, se résume à des mots. Le droit doit
prendre vie, évoluer, prendre une part active dans le monde, ou bien il
n'est rien. En évoquant les gouvernements nous avons déjà brièvement
parlé du pouvoir exécutif ; mais la question qui vient en premier est
"Qui applique la loi, et comment est-elle appliquée ?"
Nombre des premières lois se focalisèrent sur le tort fait par une
personne à une autre. Si je vous blessais ou volais vos biens, la loi
était de votre côté. Vous pouviez appliquer la loi, me conduire devant le
chef et exposer votre histoire. Je répondais, et le chef décidait qui
avait raison. Parfois, le droit vous permettait de vous venger
vous-même.
Mais comme la société se complexifie, il n'est plus si simple d'identifier
qui nous a fait du tort, ou pour le chef de régler notre différent. Je ne
sais pas forcément qui a volé mon portefeuille manquant. Si j'ai été
tué, la personne la plus lésée ne peut exposer son cas. De plus, Le chef
a davantage à faire avec davantage de gens quand son peuple grandit.
L'application de la loi devient l'affaire d'un plus grand nombre de
personnes, de forces de police et de tribunaux.
Mais encore une fois, cela peut se concevoir de nombreuses façons, et nous
définissons avec chaque option des aspects de notre monde que nous
n'aurions pas envisagés (sans cela).
Le système féodal est un choix populaire pour les univers de JdR, soit
parce que nous recherchons quelque authenticité dans nos univers
médiévaux et orientaux, soit parce que nous préférons importer la
chevalerie et l'honneur dans nos univers futuristes, et le cérémonial des
chevaliers et de leurs seigneurs se reflète dans cela. C'est également
sous de nombreux aspects le plus simple des systèmes, aussi
commencerons-nous par lui.
Le système féodal est simple car il est essentiellement linéaire : le
gouvernement, l’armée, les forces de police et les tribunaux sont
tous incorporés dans une seule chaîne d’autorité. Que ce soit un
chevalier anglais ou un samouraï japonais, le pouvoir de faire les lois, de
les appliquer et de dispenser la justice est dans les mains d’un seul
individu. S’il existe une possibilité de faire appel, elle réside dans
le seigneur du seigneur, et finalement en remontant la chaîne, jusqu'au roi.
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[1] NdT: celui de Nottingham, pas celui de
Tombstone. |
Mais c’est un système intrinsèquement sensible aux abus. Le shérif, [1]
en plus de collecter les impôts, d’enrôler les soldats et de préserver
la paix, doit aussi enquêter sur les crimes et administrer la justice.
Comme il ne peut pas tout faire lui-même, il emploie des hommes pour l’aider.
Ces hommes progressent dans la hiérarchie en résolvant ces crimes.
Ainsi, pour l’enquêteur, ce qui compte c’est de découvrir un coupable
aussi vite que possible et de présenter son suspect au Shérif. Celui-ci a
aussi des supérieurs à satisfaire, et, confiant en ses hommes, il prendra
leurs dires comme preuve de la culpabilité du criminel qu’ils lui
amènent. Si vous n’avez pas de droits ou de statut particuliers, il risque
de ne même pas écouter votre défense ; si ses soldats ont fait leur
travail, ils l’ont déjà écoutée et l’ont rejetée, il n’a donc pas
besoin d’y revenir.
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Ne laissez pas les joueurs s’en sortir
avec des anachronismes ! Si vous voulez que votre monde ait l’air
étrange, ne permettez à aucun des postulats du monde réel de se
répercuter dans la partie. |
Les joueurs, qui s’attendent (sans grand réalisme) à un système légal
plus équitable, peuvent se plaindre que les droits de leurs personnages ont
été bafoués. Mais les personnages ont-ils réellement des droits et si
oui, quels sont-ils et comment sont-ils protégés ? En outre les personnages
comprennent-ils leurs droits ? Pour des personnages convenablement
éduqués, le meneur peut être obligé d’expliquer ce qu’ils savent.
Cependant, des aventuriers dans un pays étranger peuvent être surpris par
des règlements et des procédures inattendues – ce qui peut être un
magnifique moyen pour déstabiliser vos joueurs.
Une des protections majeures des droits est le partage des responsabilités
dans l’application de la loi. En séparant ceux qui jugent – les
tribunaux – de ceux qui enquêtent – la police, nous interposons un
bouclier contre de tels abus, parce qu’une branche doit convaincre l’autre
qu’elle a arrêté la bonne personne. Il y a alors une forme ou une autre
de procès. Avec les tribunaux et les procès, apparaissent des règles
élaborées relatives aux preuves et aux droits. Plusieurs aspects doivent
être pris en compte, car ils feront la différence, si un
personnage doit faire la loi ou y est confronté.
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[NdT : Le lecteur pourra se
familiariser avec quelques notions du droit américain ici] |
Les lecteurs de cet article sont quelque peu familiers avec les droits
fondamentaux des systèmes légaux modernes Cependant, il y a des droits encore
plus élémentaires qui n’ont pas toujours été garantis, ou pas à tout le
monde.
Le premier des droits est la présomption d’innocence, c’est-à-dire que
vous pouvez être mis en détention pour vous empêcher de fuir mais jusqu’à
ce que la preuve de votre culpabilité soit faite, vous devez être considéré
comme innocent. Mais qu’entend-on par "preuve" ? La loi
américaine reconnaît cinq "degrés de conviction" qui ont
différentes fonctions. Le plus important est "au-delà de tout doute
raisonnable". Il signifie qu’il n’y a aucune autre explication
plausible du crime que la culpabilité du défendeur. Devant les tribunaux
modernes, un défendeur ne peut être déclaré coupable d’un
crime, ou privé de sa vie ou de sa liberté à moins que la preuve n’ait
été faite à ce degré.
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[2] NdT : Blake 7 est une série
culte de science-fiction, britannique |
Mais prouvé à qui ? Pendant des siècles, ces décisions furent prises par des
professionnels. Tout d’abord, comme nous l’avons vu, la police n’avait qu’à
se le prouver à elle-même ou à ses supérieurs – l’adjoint à son
shérif, ou le samouraï à son daimyo. Plus tard, des juges professionnels
indépendants prirent les décisions, comme dans les tribunaux européens
post-médiévaux. Certains univers de Science-Fiction, tels que Blake’s 7
[2], ont dépeint un futur dans lequel les ordinateurs estiment la valeur des preuves.
Mais aujourd’hui nous avons des jurys – et une distinction particulière
entre "l’interprète des faits" et le "gardien de la loi".
Ce dernier est toujours un juge versé dans la compréhension du droit. Son
rôle est de décider quelles lois applique, de contrôler quelles preuves sont
prises en compte, et d’expliquer ce qui est dans les faits nécessaire pour que le
défendeur soit déclaré coupable. Le jury est l’interprète des faits, qui
détermine si la loi a été violée ou non en se basant sur les preuves
présentées et sur l’explication de la loi fournie par le juge. Mais même
lorsqu’il n’y a pas de jury, ces deux tâches sont distinctes : s’il y a
un droit d’appel, cela signifie que le juge s’est trompé dans l’application
de la loi. On ne peut faire appel des faits mis au jour. Le personnage déclaré
coupable d’un crime peut faire appel, mais il ne peut arguer du fait qu’il n’était
pas sur les lieux de crime si le jury a décidé qu’il y était.
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[3] NdT : Il y eut deux procès O.J. Simpson
: un jury l'innocenta au procès pénal, mais il fut reconnu coupable lors
du procès civil, et condamné à payer des dommages- intérêts. Dans ce
dernier procès, la retranscription du premier procès peut être
utilisée comme preuve. En effet, au pénal, le degré "au-delà
de tout doute raisonnable" est nécessaire pour inculper, mais seule
la "prépondérance de la preuve" suffit devant un
tribunal civil. |
Le degré de conviction suivant est une preuve "claire et
convaincante". Il n’est pas aussi important que le premier. Il est rare
dans la jurisprudence moderne et n’est employé que pour des questions
techniques précises. Il ne requiert pas qu’il n’y ait pas d’autre
explication plausible, mais seulement que l’interprète des faits soit
persuadé que c’est ce qui est arrivé. En dessous, on trouve la "prépondérance de la preuve". Il ne nécessite même pas que le jury soit
convaincu, mais seulement qu’il considère ces faits comme les plus probables.
Lorsqu’un comique a dit en blaguant que les avocats qui poursuivaient en
justice O.J. Simpson pour la mort de sa femme souhaitaient voir la
retranscription de son procès pour meurtre acceptée pour preuve de sa
culpabilité [au procès civil] [2], ce n’était ni aussi drôle ni aussi
cynique que ça en avait l’air : ils n’avaient besoin que de ce niveau de
preuve pour obtenir des dommages et intérêts.
Les fictions policières mentionnent constamment la "cause probable".
C’est le niveau suivant. Il signifie qu’il y a une présomption de la
culpabilité d’un individu, et que sur cette base, sa vie va être
bouleversée et passée au peigne fin. Il est lié à la protection
contemporaine contre la fouille et l’arrestation injustifiées : la police ne
peut vous importuner de façon trop importante sans raison claire de vous
suspecter. C’est aussi le niveau le plus faible requis pour arrêter quelqu’un,
pour l’empêcher de fuir. Le niveau de preuve le plus bas est le
"soupçon certain" ; il y a un élément spécifique identifiable qui
peut indiquer la culpabilité, même si ce n’est que des regards furtifs ou un
individu qui fuit les regards. Dans la jurisprudence moderne, cela ne permet que
d’arrêter quelqu’un pour l’interroger et pour rechercher des armes.
Mais c’est le sujet de cette longue discussion. Votre système légal n’a
pas besoin d’être limité par ces degrés. Que se passerait-il si un soupçon
certain était suffisant pour arrêter quelqu’un, ou si les criminels
pouvaient être mis en prison pour une simple cause probable ? Que se
passerait-il si les suspects pouvaient être exécutés sur un soupçon
certain ? Inversement, si la police ne pouvait arrêter quelqu’un qu’avec
un niveau de prépondérance des preuves ? Les joueurs peuvent savoir
avec certitude qui a volé l’équipement de leur personnage, mais peuvent-ils
le prouver au niveau requis ?
Nous sommes tous familiers avec ces histoires où le défendeur est coupable
jusqu’à ce que son innocence soit prouvée. L’absurdité de ceci devrait
être évidente : aucun crime ne peut être résolu avant que toutes les autres
personnes soient prouvées innocentes. Cependant, cela peut fonctionner dans un
contexte différent. Si vous créez un système légal où la cause probable
établit la culpabilité d’un criminel, vous pouvez exiger que le défendeur
prouve son innocence au delà de tout doute raisonnable. Un tel système
engendrerait un taux de condamnation bien plus important pour un travail bien
moindre de la part de la police. Les joueurs auront aussi bien plus de mal à
éviter d’être arrêtés et punis très régulièrement durant la plupart des
parties. En changeant les niveaux de preuves, vous pouvez rendre l’application
de la loi beaucoup plus difficile, ou plus facile. Si les joueurs sont des
défenseurs de la loi, une application facilitée joue en leur faveur ; s’ils
sont hors-la-loi, elle joue contre eux.
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Les MJ de mondes de fantasy peuvent s’amuser
à rendre les aspects magiques irrecevables auprès des tribunaux. Un sort
de clairvoyance peut dire aux joueurs ce qu’ils ont besoin de savoir,
mais ils pourraient être confus lorsqu’on leur demandera d’étayer
leurs accusations. |
Mais comment la culpabilité est-elle prouvée? La police présente des preuves.
Qu’est-ce qu’une preuve ?
En dernière analyse, toute preuve est un témoignage. Ce n'est pas le moule en
plâtre de la botte que le tribunal considère, mais le témoignage que
l'empreinte trouvée sur le lieu du crime correspond à la chaussure du
défendeur. Le sang sur la lame peut être une preuve pour la police, mais au
tribunal c'est l'affirmation de l'officier de police qu'il y avait du sang sur
la lame, et l'affirmation de l'expert que ce sang provenait de la victime. Pour
l'enquêteur, des traces de morsure, de l'ADN et des empreintes digitales
identifient toutes le criminel. Cependant le jury ne regarde pas ces choses là,
mais le témoignage que l'enquêteur porte sur eux - et si un témoin plus
crédible (comme un noble ou un homme d'église) témoigne qu'il n'y avait pas
de sang sur la lame, cela peut n'avoir aucune importance qu'elle soit toute
rouge maintenant.
Ce témoignage se compose de mots. Dans le monde anglophone moderne, les
témoignages sont verbaux pour trois très bonnes raisons. Premièrement, il est
possible qu'une personne illettrée ait pu voir ou entendre quelque chose
d'important. Deuxièmement, l'interprète des faits doit pouvoir observer le
"comportement du témoin", pour déterminer s'il ment.
Troisièmement, un témoin ne doit pas avoir le temps d'inventer des réponses ;
il doit savoir ce qu'il a vu, et répondre en conséquence.
Selon le code Napoléon, le témoignage est écrit, pour trois très bonnes
raisons. Premièrement, un illettré est probablement moins intelligent, moins
observateur et moins capable d'exprimer ses observations avec précision.
Deuxièmement, l'interprète des faits ne doit pas être influencé par les
capacités de persuasion d'un gentleman-cambrioleur charmeur ou d'un menteur
convaincant. Troisièmement, un témoin qui a le temps de réfléchir se
souviendra avec plus de précision, et est moins susceptible de commettre des
erreurs.
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Un système légal exigera certainement que
ceux qui témoignent soient sains d’esprit – rendant la chose
difficile pour des personnages de l’Appel de Cthulhu ! |
Et qui est amené à témoigner ? Les policiers, bien sûr– ils doivent
convaincre le tribunal de la culpabilité du défendeur. Vous pourriez vous en
tenir là. Cependant, il peut être utile, dans la recherche de la vérité, d’entendre
d’autres personnes. Doivent-elles savoir lire et écrire ? Cela peut poser un
problème aux personnages, si ceux qui ont vu ce qui s’est passé sont pauvres
et sans éducation. Mais il peut y avoir d’autres critères. Peut-être que
tous les témoins doivent être des citoyens, ou même (dans une société
hiérarchisée), citoyens d’un certain niveau. Un tribunal féodal peut tout
à fait se satisfaire du témoignage d’un seigneur qui déclare que son
garçon d’écurie a vu le criminel, et ne pas vouloir entendre les
protestations du serviteur qui clame le contraire ! Dans de nombreux pays, seuls
les membres de la communauté religieuse officielle peuvent parler ; et ce n’est
que récemment que les tribunaux américains ont autorisé les athées à
témoigner – si vous ne croyez pas au dieu correct, qu’est-ce qui vous
empêche de mentir sous serment ? Les personnages qui se retrouvent dans un pays
lointain peuvent découvrir qu’ils n’ont pas le droit de témoigner pour
défendre quelqu’un qu’ils savent innocent, ou même pour se défendre
eux-mêmes.
Les séries télévisés sur les tribunaux sont pleines d’avocats hurlant
"Objection!". Il y a beaucoup de choses qui ne peuvent pas être dites
dans un tribunal ; les Règles Fédérales sur les Preuves contiennent plus d’une
centaine de sections sur ce qui ne peut pas être utilisé comme preuve. Mais
pour faire simple, vous pouvez les réduire à deux mots: pertinence et
fiabilité. Rapporter un ouï-dire est interdit car ce n’est pas fiable (il a
dit qu’elle a dit qu’ils ont dit). Témoigner que le défendeur est de
manière générale un individu méprisable n’est pas permis car ce n’est
pas pertinent (être grincheux n’est pas un crime). Vous pouvez construire
votre propre code de preuve sur ces principes et décider quel degré de
pertinence ou de fiabilité un témoignage doit atteindre – s’il en faut.
Votre combattant a tué une centaine de soldats ennemis en bataille le mois
dernier ; cela le rend-il susceptible d’avoir empoisonné le maire ? Si c’est
le cas, il pourrait être inculpé et se retrouver à regretter tous ces
massacres d’orcs dont il était si fier auparavant.
Il y a quelques autres droits que le meneur doit prendre en considération. Ces
droits existeront dans certains univers, mais pas dans d’autres. Construire
votre propre système légal, unique mais réaliste, revient simplement à
changer les droits qu’il inclut.
L’accusé peut avoir le droit de connaître les charges qui sont retenues
contre lui, ou non. Il peut être inculpé et jeté en prison même sans savoir
pourquoi. Cela peut être très frustrant pour les personnages. Incapables d’apprendre
pourquoi leur compagnon a été incarcéré, il peuvent découvrir que leur
meilleur recours est de le faire évader et de fuir le pays !
Le droit de connaître les preuves qui sont retenues contre soi peut ne pas
exister, surtout si les témoignages sont écrits. De même, l’accusé peut ou
non avoir le droit d’être confronté aux témoins ou de questionner ses
accusateurs. En empêchant l’accusé de connaître les preuves, on protège
les témoins de toutes représailles éventuelles. En permettant à l’accusé
d’être confronté aux preuves et aux témoins, on lui donne l’opportunité
de répondre aux charges. Bien sûr, cela suppose que le défendeur à le droit
de présenter une défense. Peut-être qu’on ne veut pas entendre ses
justifications – si la police peut présenter des arguments persuasifs de sa
culpabilité, qui est-il pour contester ? Equilibrez les pouvoirs comme vous le
souhaitez pour favoriser l’intérêt de l’histoire. Si les personnages
savent que le boucher ment, ils peuvent découvrir pourquoi avec un peu d’enquête.
Mais s’ils ne savent même pas qui a témoigné, ils pourraient découvrir que
la personne qui semble la plus empressée à les aider à découvrir la vérité
n’est autre que celui qui est à l’origine du coup monté contre eux.
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[4] NdT : la question était "Es-tu
le messie ?", et la réponse blasphématoire de Jésus fit qu’il
se condamna lui-même. |
Qu’en est-il du droit contre l’auto-incrimination ?. C’est un
concept moderne. Le procès de Jésus illustre un avis opposé sur la question :
le grand prêtre lui imposa de jurer de répondre honnêtement ; la nature de ce
serment était telle que ne pas répondre était un mensonge [4]. Les
défendeurs ont-ils la possibilité de refuser de répondre, ou doivent-ils
être forcés de répondre par tous les moyens jugés appropriés ? Et comment
répondront-ils si les questions sont de nature manipulatrice ou compromettante
? "Etiez-vous là ?" "Est-ce votre couteau ?" "Ne
haïssiez-vous pas le défunt ?"
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Souvenez-vous que peu de joueurs voudront
interpréter un procès qui traîne en longueur, aussi concentrez-vous sur
les effets théâtraux plutôt que sur les subtils détails de
jurisprudence. |
Dans un monde où la loi est complexe, on a créé le droit au conseil. Dans un
système très simple, personne n’imaginait que vous ayez besoin que l’on
vous explique la loi ou que quelqu’un y travaille pour vous. Il est tout à
fait possible que la loi interdise à quiconque d’avoir une autre personne qui
le défende, désavantageant alors clairement ceux qui ne sont pas familiers
avec le système légal local. Il est plus que probable que ces avocats
professionnels ne sont accessibles que pour ceux qui ont les moyens de les
payer. Les personnages sont-ils disposés à donner beaucoup de leur or durement
gagné pour avoir de l’aide dans leur problèmes légaux, ou feront-ils
confiance à leur propre débrouillardise ?
Nous allons brièvement jeter un oeil à deux autres droits. L’un est le droit
à un jugement définitif, le droit d’être libéré de ce qui a été appelé
la "double incrimination" dans notre monde. Sans cela, la police peut
vous arrêter encore et encore pour le même crime, jusqu’à ce qu’ils
arrivent finalement à prouver à quelqu’un que vous êtes coupable. Il y a
toutefois une raison pour permettre un second jugement sur les mêmes charges si
de nouvelles preuves sont découvertes. Si vous permettez ceci dans votre monde,
vous pouvez créer un détective local résolu à prouver la culpabilité des
personnages pour un certain crime, apparaissant de temps en temps pour les
arrêter à nouveau et les soumettre à la procédure une fois de plus. Cela
signifie que les personnages ne peuvent jamais vraiment se sentir en sécurité.
Un second droit est le droit d’appel. Voyez-le comme si vous disiez au juge :
"Laissez-moi parler à votre supérieur." Comme nous l’avons dit,
les appels dans notre système ne peuvent remettre en cause que la
compréhension que le juge a de la loi ; on suppose que ceux qui ont examiné
les preuves à l’origine ont la meilleure chance de parvenir aux faits réels
(en partie parce qu’il peuvent évaluer qui ils peuvent croire). Un nouveau
procès n’est nécessaire que si la cour d’appel croit que des preuves ont
été incorrectement inclues ou exclues. Avec un système de témoignages
écrits il est plus plausible qu’une court supérieure puisse réexaminer les
faits car ils ont le même témoignage devant eux. Bien sûr, il y aura toujours
quelques règles sur qui peut faire appel, quand et pourquoi – après tout,
César ne souhaite pas entendre toutes les querelles de chaque paysan de son
empire. Dans les tribunaux modernes, un appel doit être basé sur une décision
rendue par un juge, et requiert usuellement que le parti faisant appel conteste
cette décision au moment où elle a été faite. Vous pouvez user d’une de
ces règles pour empêcher les joueurs de croire que les appels sont une
échappatoire facile.
Avec tout ceci en main, vous devriez pouvoir mener un procès en toute
quiétude. Mais une fois le procès terminé, que faire des criminels ? Nous les
avons battus à coups de bâtons et de pierres, exposés en public, enfermés à
l’écart et tués ; mais ce que nous faisons dans un monde particulier dépend
de pourquoi nous le faisons. Nous examinerons ceci dans notre dernier épisode. |
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M. Joseph Young est co-auteur de Multiverser : the Game et vice-président pour le développement de Valdron Inc. Il est diplômé de la Widener University School of Law. Il a abondamment écrit sur de nombreux sujets dont les jeux de rôle, le droit et la théologie, la plupart ayant été
mis en ligne et en indexé
de façon pratique.
Cet article est le second d'une série de trois. Vers
la troisième partie |
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Traduit par Antoine Drouart. Tiré de
PTGPTB n°10, avec l'aimable autorisation de Steve Darlington. Aucune
reproduction n'est permise sans l'accord de Steve Darlington. "Places to
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version originale peut être consultée sur le site de PTGPTB.
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