[NdlR - lire Mes
mésaventures de Grandeur-Nature] |
Je sympathise pleinement avec le pauvre Archimedes [NdlR] et je confirme ses observations sur Vampire
: La Mascarade. J’ai, malheureusement, participé à une dizaine de
parties moi-même et j’ai eu la honte de mener les quatre premières.
Pourquoi dois-je m’infliger ceci, encore et encore ? Quelque fantasme dément,
ou quelque besoin refoulé, peut-être ? En dépit de l’amère déception que
j’ai ressentie lorsque j’ai ouvert la première version en boîte de la
Mascarade, en 1993 (Dieu ! Comment ai-je pu être aussi jeune et inconscient
? J’ai dépensé 30$ pour ce truc !) et que j’ai découvert avec horreur qu’ils
s’attendaient réellement à ce que je joue à pierre-papier-ciseaux- dans des
réunions publiques ou semi-publiques ; en dépit de ceci, j’ai foncé tête
baissée et J’AI INVITÉ MES AMIS Á JOUER.
J’ai invité tous mes amis et, un ou deux mois plus tard, ils n’étaient
plus mes amis. Je n’étais particulièrement plus le bienvenu chez eux. C’était
horrible, impensable, et je ne comprenais même pas ce qui arrivait.
Voilà ce qui vous passe par la tête lorsque vous décidez d’organiser une
partie de la Mascarade.
« Hé! J’ai dépensé un paquet de pognon pour ce truc et je me suis pour
ainsi dire amusé avec Vampire sur table… en quelque sorte. Il n’y a
que le MJ qui se mettait en travers de mon chemin. Peut-être qu’une partie en
Live Action ne nécessitera que peu ou pas du tout d’intervention du MJ ! Je
pourrais laisser quelques indices et accessoires ici ou là, donner aux gens
quelques motivations de base et l’histoire se déroulera d’elle-même. Cela
pourrait être, comme c’est dit sur la boîte, du théâtre expérimental. »
Maintenant, je ne sais pas pour vous, mais je n’ai jamais réellement assisté
à un spectacle de théâtre expérimental de bout en bout. Mon père y est
allé, dans les années 60, et il ne peut en parler sans avoir ce regard
tourmenté qu’il a aussi lorsqu’il raconte des scènes de torture du
Viêt-Nam.
La seconde chose à laquelle vous pensez à propos du jeu, une fois que vous
avez démarré la partie et qu’il devient évident que tout le monde ressent
encore le besoin DE FAIRE PASSER PAR VOUS TOUS LES PETITS TRUCS QU’ILS VEULENT
QUE LEUR PERSONNAGE FASSE, vous le MJ (ou le « Narrateur » en patois White
Wolfien) est : « Houlala, ils aiment toujours mes décisions. Je suis flatté,
je vais recommencer, et bientôt ! »
Vous ne remarquez pas le chaos, l’ami qui ne vous rappelle plus, et les ruines
de ce qui fut autrefois votre maison bien rangée. Vous êtes ivre de la gloire
de commander à une foule d’artistes libres-penseurs, de gens qui élèvent le
Jeu toujours plus haut, et vous organisez une deuxième partie. Dans cette
partie, il y a encore plus de monde et vous remarquez avec délice que le nombre
de femmes dans votre vie s’est accru de façon exponentielle. Non seulement
cela, mais en plus ces femmes sont habillées de résille noire sexy, qui
rendrait n’importe qui attirant, et portent ce genre de maquillage audacieux
que vous n’avez vu que dans les vidéos de groupes rock des années 80.
Vous vous dites alors: « Oh ! Oui ! c’est bien mieux qu’AVANT. »
Mais, ce que vous ne réalisez pas, pendant que vous et vos compatriotes mâles
parlez des ces filles si si si sexy, elles parlent de la puissance de leur
personnage ou, si vous avez de la chance, de drogue.
A ce stade, il est trop tard. Des gens dont vous ne soupçonniez même pas l’existence
apparaissent dans votre vie. Des gens qui NE VOUS ÉCOUTENT PAS, mais qui ne vous
gratifient pas de la courtoisie de vous le dire franchement, comme vos amis le
faisaient. En outre, il devient de plus en plus difficile de construire des
intrigues pour quarante ou cinquante personnes qui ont leurs propres plans, et…
et…
Vous déclarez, à peu près lors de la troisième nuit, que - Oups ! - personne
n’a remarqué que la maison était bourrée de C-4 et que cette Orgie des
Damnés (trois mecs courant autour de la maison en hurlant, une quinzaine s’ennuyant
et fumant sur le lit, plusieurs demandant où est réellement l’alcool et deux
cherchant un endroit où violer un enfant prostitué imaginaire) a été
éparpillé dans l’atmosphère. Non seulement ils ne pigent pas, mais ils se
contentent de sortir et de s’égailler dans la véranda. Alors vous leur dites
qu’ils sont tous morts et ils vous portent un toast avec quelque chose qui n’est
pas du sang. C’est à ce moment que vous réalisez que, de ces quelques
cinquante personnes qui font partie de votre vie, vous n’en connaissez aucune.
Peut-être que, si vous avez de la chance, vous comprenez le message et vous
vous excusez auprès de vos camarades dérangés et maintenant encore
un-peu-plus-psychologiquement-traumatisés. Puis vous retournez à la table de
jeu.
Mais, peut-être êtes vous comme moi et pensez-vous : « Qu’est-ce qui a
foiré ? Peut-être devrais-je essayer d’être joueur ? » Et vous avez
entendu des histoires à propos de gens qui se sont réellement (Horreur !)
TOUCHÉS lors d’un GN, alors vous rejoignez le Fan Club Officiel de la
Mascarade et, juste pour assurer vos arrières, vous vous assurez que ce
fanclub joue une version « Contes de Fées » de l’univers de jeu.
Vous y allez, craignant le pire, seulement pour découvrir que, quoi que vous
disiez, qui que vous contactiez et quoi que vous fassiez, IL NE SE PASSE
FOUTREMENT JAMAIS RIEN. En fait, les règles (si vous arrivez à les comprendre)
sont écrites de telles manières que les gens sont dissuadés d’interagir les
uns avec les autres. Ils mettent « Timide » comme trait de caractère dans un
jeu qui repose sur l’interaction pour toute sa dynamique. Non seulement ça,
mais il n’y a pas d’intrigue (c’est logique, de toutes manière) et la MJ
reçoit avec un sourire béat celui qui vient la voir comme un chiot idiot et
perdu (et pour venir la voir, il faut avoir quelque chose à faire).
Personne ne semble connaître les règles. Vous êtes coincé dans une société
avide d’un pouvoir qui est absent, avec de l’argent qui n’existe pas et de
jolis minois qui ne veulent pas vous parler. De plus, aux US, il n’y a ni
drogues, ni alcool, ni cigarettes.
Alors vous trouvez un type, un nouveau, et vous faites de sa vie un enfer tout
au long de la soirée. Le lendemain, ils viennent vous entourer et vous disent
tous combien vous avez été génial et combien ils sont impatients de vous voir
à la prochaine soirée.
Oui, Archimedes, ils m’ont dit cela aussi. Cela s’appelle « amadouer le
pigeon » et l’idée est que vous soyez tellement avide de louanges et d’adulation
que vous y retournerez. Tu as cogné le gars qui a essayé ça sur toi, mais
moi, non, j’étais trop naïf et j’y suis retourné encore et encore.
Je sens aussi le désir monter à nouveau en moi. Je pense : « J’écrirai un
meilleur scénario. Je peux faire mieux que ça. J’écrirai un GN qui n’a
absolument pas besoin de MJ, où les joueurs se régulent tout seuls et où les
anciens sont forcés de donner aux nouveaux des indices et des conseils. Je le
servirai avec de la confiture à la menthe dans une jolie robe de dentelle. La
lou li la lou, la vie sera si merveilleuse avec si peu de piano !!! »
Et je rirai alors qu’ils me ramèneront de force dans leurs griffes. Ils ne s’en
douteront même pas. Hé ! Hé ! Hé !
Malludituri te Salutant.
Ceux qui vont jouer comme des pieds te saluent !
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