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Il était une fois :

Une distraction intéressante

Par Raymond Smith

Ou l'auteur avoue qu'il préfère la réalité à l'imaginaire

Beaucoup de mes amis me considèrent comme un rôliste. Après tout, tous les quinze jours je retrouve des amis de l'université et nous passons un bon moment à jouer à tout ce dont il nous prend l'envie. Mon nom est inscrit sur un site dédié au jeu de rôle. Je sais qu'il n'y a pas que AD&D et TSR. Je peux jouer un personnage intéressant et on m'a même demandé, à l'occasion, de maîtriser. J'ai défendu le jeu de rôle contre les esprits étroits qui le critiquaient. En bref, j'ai beaucoup joué et j'ai tous les attributs du rôliste.

Mais je n'en suis pas un. Du moins, je ne pense pas que j'en sois un. Après tout, je ne possède même pas un d20.

 

The Babylon Project est publié par Chameleon 
Eclectic
. Pour une vue d'ensemble sur
Babylon 5 allez voir The Lurkers' 
Guide
.

Le seul matériel de jeu que je possède est The Babylon Project et c'est plus dû à ma dépendance envers la série télévisée qu'à un désir de jouer un scénario. (En passant, si vous avez mon exemplaire, rendez-le-moi s'il-vous-plaît !)

Peut-être suis-je coupable par complicité. Mon frère, Rick, écrit des systèmes de jeu, comme mon ami Simon Dennis. Steven Darlington (Contremaître d'esclaves, euh, je veux dire rédacteur en chef de cet e-zine) qui est accro au jeu de rôle, a recours au harcèlement pour obtenir sa dose hebdomadaire. Je pourrais continuer et lister tout mes amis fanas de jeu de rôle mais cela ne ferait que plomber la démonstration.

"Pourquoi joues-tu ?", pourriez-vous me demander. Eh bien, ma première rencontre avec le jeu de rôle arriva en cinquième, à l'école. Le jeu s'appelait Living Steel. De mémoire ça ressemblait beaucoup à Shadowrun ou Manhunter [1] (Bien que Steve me dise que c'était plutôt comme Battletech). L'occasion de jouer des méchants qui vadrouillent dans l'univers en tuant des trucs.

C'était à la même époque que jouer avec des GI-Joe ou faire semblant que l'école était un vaisseau spatial pendant la pause déjeuner, se mit à être ringard. Le genre de crime punissable de moquerie aussi bien par les amis que les ennemis. Quoiqu'il en soit, le jeu de rôle ne posait pas ce genre de problème car c'était un truc cool que faisaient les ados. La mauvaise réputation de ce loisir était aussi un avantage.

Donc le jeu de rôle a d'abord été, pour moi, une manière adulte de jouer aux GI-Joe, quoique étant beaucoup plus riche en possibilités. Il devint rapidement évident que se débarrasser des figurines permit à notre imagination de s'envoler vers de nouveaux sommets. Cette richesse du jeu améliora probablement notre culture littéraire par la même occasion.

Mais nous n'en étions pas au niveau de nous glisser dans la peau d'un personnage différent. Au lieu de cela nous essayions d'être ce que nous souhaitions le plus être. Pour moi cela signifiait être un "Sorcier", ce personnage énigmatique aux pouvoirs occultes. Bien entendu, la capacité de briser les os des durs à cuire était loin de ce que j'avais en tête.

 

Avon était le génie informatique de la série culte de S-F Blake's 7. [2]

Et puis j'ai découvert les ordinateurs et j'ai pu vivre mes fantasmes dans la réalité. Les connaissances ésotériques et le pouvoir du mage de façonner le monde qui est dans la machine. Ce fut le début d'un long hiatus dans ma pratique du jeu de rôle. Réduire les lignes de code et contrôler la machine devinrent les débouchés de mon imagination. Je devins Avon plutôt que Gandalf.

Tant que je fus au lycée, les ordinateurs et les discussions me prenaient tout mon temps. Ce que je fis de plus proche du jeu de rôle fut Heros Quest. Ce n'est qu'à la fin de mes années d'université que j'entendis à nouveau le chant des sirènes du jeu de rôle.

Mais, en fait, comme la plupart des boutonneux collés à leur ordinateur, je m'étais intéressé à la S-F, au fantastique et à l'histoire depuis mon enfance. Tout au long du lycée et de la fac je m'y étais réfugié, laissant vagabonder mon imagination dans des mondes crées par d'autres, discutant avec mes amis à propos des créations de leurs auteurs. Je ne me suis donc jamais éloigné des histoires se déroulant dans des mondes imaginaires. C'est juste que j'en ai fait l'expérience comme spectateur omniscient, mais impuissant.

A cette époque je créais des mondes virtuels faits de logique et de logiciels plutôt que des mondes fantasmagoriques faits d'imagination. Pour moi, les deux sont étroitement apparentés en ce qu'il s'agit dans les deux cas de la création de systèmes et de la simulation de la réalité.

 

La production et la présentation du magazine font aussi appel aux compétences techniques de Ray.

Vous voyez, j'aime construire et explorer des systèmes complexes d'entités interactives. Pas que des entités technologiques, mais aussi des gens dans leurs relations aux autres et au monde, ce qui forme l'un des systèmes les plus complexes et les plus intéressants qui soient. Une grande partie de l'attrait que j'éprouve pour le jeu de rôle réside dans sa simulation de ce système à différents moments, en différents lieux.

Mais ce n'est pas ce qui fait que le jeu de rôle vaut le coup. Après tout, je peux explorer ces choses avec davantage de profondeur et de rigueur dans de nombreux arts et sciences, et certains diraient que nous devrions simplement sortir et vivre ! L'attrait du jeu de rôle réside dans l'expérience subjective et (par-dessus tout) partagée de ces systèmes.

Dans le jeu de rôle nous pouvons mettre de côté le cérémonial et les conventions d'une argumentation raisonnée, baisser notre garde et, au milieu des pizzas et du Coca, autoriser nos pensées à vagabonder sur ce que nous attendons que les gens fassent. Nous pouvons partager une hallucination amenée sans substances psychotropes. Nous pouvons dire des trucs que nous ne dirions jamais dans la vraie vie, explorer l'absurde sans crainte de se faire traiter d'imbécile ou de ruiner notre vie.

Le jeu de rôle me permet de prendre plaisir à explorer des mondes sans le sérieux de circonstances qui accompagne d'habitude cette activité, et je peux le faire en société, avec des amis. Cependant, bien que je trouve qu'il s'agit d'une distraction intéressante, pour moi, cela ne peut pas être plus que cela. Car, une fois qu'on a bu le Coca et terminé l'aventure, nous devons nous réveiller dans cette aventure bien plus grande qu'est la vie, avec tous ces gens et ces systèmes complexes. Les utopies et les cauchemars de notre imagination ne peuvent être que des fac-similés de la réalité et bien que j'aime y vivre, le Vrai Monde est infiniment plus fascinant.

Quel a été votre premier jdr ? Pourquoi ne pas écrire sur ce sujet pour cette rubrique ?


[1] NdT: Living Steel est un jeu de science-fiction ou les joueurs incarnent des chevaliers hi-tech sur une planète dévastée par des aliens. Leur but étant de refonder leur civilisation.
Dans
Manhunter les personnages sont des chasseurs de primes dans un univers S-F où la magie est présente.

[2] NdT:
Blake's 7 est une série télévisée britannique de la fin des années 70 se déroulant dans un futur lointain ou une équipe de hors-la-loi combat un régime totalitaire appelé la Fédération.

En tant que seul scientifique parmi les rédacteurs, Raymond est une figure importante, quoique souvent dans l'ombre, de l'équipe de PTGPTB. Il gâche beaucoup du temps précieux qu'il pourrait consacrer aux jeux de rôle à bidouiller des ordinateurs pour CiTR et HUMBUG. Il aime Babylon 5, Tolkien, la littérature et restaurer sa Rover P6 bien aimée.

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Traduit par JMS. Tiré de PTGPTB n°4, avec l'aimable autorisation de Steve Darlington. Aucune reproduction n'est permise sans l'accord de Steve Darlington. "Places to Go, People to Be" et "PTGPTB" sont aussi sous copyright. La version originale peut être consultée sur le site de PTGPTB.