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Ca va peut être vous surpendre, mais le playtest est
un boulot difficile. Il faut avoir l'esprit critique, faire attention au
moindre détail et avoir une connaissance des règles du jeu de rôles en
question, en plus d'avoir au moins quelques bases littéraires pour
reconnaître un texte bien écrit. Tester un scénario jusqu'à sa destruction
peut nécessiter plusieurs sessions et beaucoup d'application.
Ou une confrontation avec la bande de Mongoose.
En tant que rôlistes, la plupart des lecteurs connaissent l'histoire du
scientifique et de son singe.
Si ce n'est pas le cas : l'histoire raconte qu'un scientifique créa une
pièce avec trois sorties et y plaça un singe afin de savoir quelle sortie il
prendrait. Le singe trouva une quatrième sortie, mettant fin à
l'expérience, et décrédibilisant le scientifique qui avait ainsi gaspillé
des millions en recherche.
Les PJ sont souvent comme le singe de l'histoire, car il est presque sûr qu’ils
inventeront une solution à laquelle vous n'avez pas pensé, ce qui oblige le
MJ à improviser à fond les ballons jusqu'à ce que les joueurs reviennent
par hasard à la trame prévue.
Etant donné que j'ai passé une quantité d'heures appréciable derrière un
écran de MJ, observant ces petits malins de joueurs de chez Mongoose, je sais
que j'ai raison quand je dis qu'ils vont toujours trouver des issues
inattendues mais aussi qu'ils ne vont même pas jeter un oeil aux sorties «
conventionnelles ». Comme le singe, ils ont l'étrange capacité d'identifier
les plus infimes faiblesses que vous avez laissé passer quand vous avez
conçu le scénario, et ils vont pousser des cris stridents et tout saloper
tant qu’ils y sont.
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[Ndt1 : à Paranoïa
les PJ sont montés les uns contre les autres et s'accusent réciproquement
de traîtrise lors du débriefing.] |
Je n'ai pas encore rencontré de... enfin, une
rencontre qui marche comme on veut qu'elle marche. Les Grands Méchants
meurent d’un seul coup de sabre laser. Deux goules massacrent la moitié
d'un groupe qui aurait dû les vaincre avant d’avoir le temps de dire «
Repousser les morts-vivants ». Il y a des tués dès le briefing de la
mission alors qu'on n'est pas en train de jouer à Paranoïa [NdT1]
. Une effraction de rien du tout devient un casse de haut vol pour une
épée qui n’a absolument rien à voir, avec des empoisonnements, la
corruption du clergé, le premier essai de danse de la chenille du monde
d'Eberron, la création de pas moins de quatre ennemis puissants, un procès
au tribunal et en bonus la déchéance d'un paladin.
En pensant à tout ça, je voudrais présenter le guide de Chez Mongoose pour
créer une aventure à toute épreuve.
1- Ne pensez pas « Accroche de l'intrigue »: Pensez « C'est le
personnage-clé de l'intrigue qui tient le flingue »
Imaginez la scène... un groupe de jeunes âmes aventureuses se rassemble dans
une taverne. Pleins de rêves d'aventure (et de bière au prix pas trop
excessif), ils décident de chercher fortune ensemble. Par une coïncidence
étonnante, un homme s'approche d'eux, offrant de leur vendre une carte au
trésor ...
« J'ai dépensé tout mon argent dans l'équipement pour l'aventure», dit
l'un.
- Et moi je l'ai échangé contre des poulets, dit un autre. Quoi? C'est dans
le livre de règles !
- Ne me regardez pas comme ça ! dit le troisième. Je suis un moine ! Les
pièces d'or avec lesquelles je commence se comptent sur les doigts d'un
jongleur manchot.
Et voilà, finie l'aventure. En théorie. Ce qui risque vraiment d'arriver,
c'est que les PJ tenteront de voler la carte. Ce qui va vraiment arriver,
c'est que les PJ vont tuer le mystérieux étranger quand il sortira pour une
petite vidange, et extraire la carte de ses doigts raidis par la mort.
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(1) C'est aussi un bon moyen de se débarrasser de
ces ennuyeux poulets. Un petit conseil aux Maîtres de Jeu : ne faites
confiance à aucun joueur dont le personnage dépense des sommes importantes
pour l'acquisition d'animaux. Rien de bon à en tirer.
(2) Vous savez ce que je pense? Je pense que ces personnes sont toutes des
marchands maléfiques déguisés. « Oui, bien sûr, j'aimerais vraiment
acheter ces 36 armures de gobelin usagées », dit le « fermier ».
Dès que votre groupe n'est plus en ville, il ira dans les grottes que vous
veniez de nettoyer, refourguant ce matériel d'occasion à la nouvelle tribu
de gobelins.
(3) Je parle du genre de groupe de mariachis qui ont des lance-roquettes dans
leurs étuis à guitare.
(4) J'ai joué des scénarios du commerce où, comme je l'ai découvert
après, nous étions censés flâner et avoir une causerie amicale avec le
grand méchant avant le combat final paroxystique. Nous nous sommes cachés
derrière une colline et l'avons pulvérisé à l'aide du genre de rituel
magique banni par la Convention de Genève.
[NdT2: dans le même genre, mais plus profond, nous vous reportons à Systèmes
de combat(ptgptb)] |
Pour éviter ce problème : votre accroche doit être irrésistible. Ne
proposez pas un homme qui veut vendre sa carte au groupe - faites exploser la
taverne ! (1) Dans les ruines, ils trouveront une carte qui mène apparemment
à la source de ce qui a détruit l'auberge. Aucun aventurier digne de ce nom
ne tournerait le dos à ce genre de pouvoir.
2-Subtilité ? On oublie...
La sagesse communément acceptée dit que chaque groupe se doit d'avoir un
filou. Quelqu'un de sournois, et de bon avec les serrures. Quelqu'un qui sait
se fondre dans les ombres, qui connaît les meilleurs endroits pour receler
des biens - parce que même dans le minuscule village de Blart (7 habitants), quelqu'un
achètera votre stock d'armures louches récemment acquises, malgré les trous
causés par les flèches et les traces de boules de feu. (2)
Malheureusement, chaque groupe contient aussi au moins un personnage pas
discret du tout. Et qui porte en permanence son armure de plates
complètes. Souvent, il complète le tableau en sonnant une cloche géante et
en braillant les tubes de Jimmy Somerville à pleins poumons. Ce personnage et
ses séides, qui sont à peu près aussi subtils qu'un groupe de mariachis (3)
(mais ne seront jamais aussi mélodieux), rendent toute tentative de
discrétion complètement superflue.
3-Diplomatie ? On oublie...
Malheureusement, pour la plupart des Personnages Joueurs, se tirer
d'affaire en parlant se résume très souvent à « Libérez-moi ou mourez !
» Des persos particulièrement ambitieux pourraient essayer « Rejoignez-moi
ou mourez. » D'autres actions diplomatiques courantes incluent « Là,
derrière toi ! », « Feu ! » et « C'est pas moi, c'est eux. »
Et ce genre de discours, c'est à peu près ce que vous pouvez attendre de
toutes les situations. Prenez un scénario classique [avec un] « jumeau
maléfique », où les joueurs doivent poser des questions intelligentes pour
discerner le bon jumeau du mauvais? On oublie. Les PJ auront probablement
manqué vos indices subtils dès le début, et Parler avec les morts
est plus simple à jeter que Discerner la vérité. Vous avez besoin
que les PJ négocient une paix très importante entre deux empires en guerre,
afin d’avoir accès à une tombe oubliée de tous et située au milieu de la
zone des combats? Relisez vos règles de combat de masse et préparez-vous à
voir le groupe tailler son chemin en marchant sur un sentier de cadavres. La
sagesse populaire des aventuriers dit : « En temps de paix, jetez les dés
pour l'initiative. »
Pour éviter ce problème : ne donnez pas une information cruciale pour l’intrigue
à un seul PNJ. Ces personnages tiennent des journaux intimes pour une raison
particulière - qui est bien sûr, que le groupe ne rate aucun indice, surtout
en fouillant leur cadavre. Le conseil est doublement valable si vous jouez une
partie dure et réaliste où les personnages peuvent êtres descendus d'un
seul coup chanceux. Si vous choisissez de mettre l'information cruciale de
l'intrigue entre les mains d'un PNJ que les joueurs détestent...ben
là, vous méritez vraiment de voir votre campagne dérailler complètement
lorsqu’ils saisiront la première opportunité de lui balancer une montagne
sur la tête. (4) Ce qui m’amène au point suivant :
4-La violence? Bien sûr !
Vous pensez que la serveuse de l'auberge n'a pas besoin de caracs de combat?
Revoyez-moi ça. Vous pensez avoir besoin d'un roublard pour passer les portes
verrouillées? Faux. Vous pensez que ce paladin, dans sa brillante armure de
plates, n'oserait pas chasser le lapin pour le dîner armé de sa hache de
bataille à deux mains? Je crois que vous avez pigé.
Pour paraphraser l'adage « quand tout ce que vous avez est une sacrée grosse
épée et une liste de compétences de combat trop grande pour votre feuille
de perso, soudain tout commence à ressembler à un combat ». [NdT2]
Pour éviter ce problème : acceptez le fait que n'importe quelle rencontre
pourrait être abordée par un groupe équipé pour chasser l'ours mais qui ne
cherche en fait que du mouton. Si un PNJ doit vraiment survivre à la fin du
deuxième round de combat - et ça vaut autant pour les Grands Méchants
Vraiment Maléfiques que pour les Nobles Chevaliers Louant les services
d'Aventuriers Mercenaires Assoiffés de Sang, soyez sûr qu'il est : soit
assez puissant pour survivre tout seul, soit copain avec des gens qui eux le
sont.
5-Ne pas dépendre de l'intrigue.
Vous savez, la ville que vous avez créée, celle qui est assaillie, fait
étrange, par des orcs, et le premier indice qui mène les joueurs à
démasquer une conspiration mondiale d'elfes noirs? Vous savez comment vous
vous êtes débarrassé de la rencontre odoriférante avec Georges Puant, le
mendiant de la ville? Bah non, cette rencontre n'était pas jetable,
finalement. Non, les PJ commencent à aimer Georges et veulent qu'il devienne
maire.Excepté une intervention divine, George sera élu, parce que les
PJ mèneront sa campagne électorale. Ils ne reculeront pas devant le meurtre
de vos PNJ cruciaux pour l'intrigue, pendant leur sommeil s'ils ne lèvent ne
serait-ce qu'un sourcil désapprobateur. Pendant ce temps, la conspiration
elfe noire continue à perpétrer de sombres machinations et devient de plus
en plus paranoïaque, au vu du manque d’aventuriers antagonistes.
Pour éviter ce problème : ne mettez rien dans votre aventure qui ne soit
directement lié à l'intrigue. Les harengs rouges prennent une signification
cosmique pour le groupe de joueurs standard, et une mention fortuite de la
mythique (et comme les MJ le savent très bien, inexistante) Sardine Ecarlate
de Boru Boru verra presque inévitablement les PJ passer des semaines
entières de temps de jeu à construire des cannes à pêche vorpales et
partir à la chasse de ces sacrés poissons.
6-Aucun PNJ ne doit être nommé d'après des gros mots ou de quelque chose
que vous puissiez trouver sur une table de petit déjeuner.
Par cela je veux dire : ne donnez pas à vos PNJ des noms qui ressemblent
à des gros mots ou à quelque chose que vous pouvez trouver sur une table de
petit déjeuner. Parce qu'en dix minutes le Général Fésrhapid sera le
Général Fesserapide et il le restera à vie. Bonne chance pour le grand
discours lyrique pour motiver les troupes avant la bataille, quand les joueurs
se plient en quatre en imaginant le puissant Général se propulsant grâce à
son arsenal fessier.
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(5) Par « nom typique de fantasy », j'entends un
nom qui comprend plus de ponctuation que de voyelles.
(6) Exception : la partie que j'ai brièvement jouée, où le sorcier du coin
s'appelait, sans ironie aucune, « P'tain ». |
Pour éviter ce problème : ...faites en sorte de ne pas appeler vos PNJ
d'après des gros mots ou de quelque chose que vous puissiez trouver sur une
table de petit déjeuner. En toute honnêteté, si un groupe de joueurs ne sont
pas en train de blaguer sur les noms de vos PNJ amoureusement construits,
ils n'ont probablement aucun sens de l'humour - mais au moins, essayez de ne
pas leur fournir de cible trop facile. Les joueurs doivent être capables de
penser correctement ; et trouver des manières inattendues de se moquer des
noms de fantasy typiques (5) fait partie de l'échauffement mental pour
surpasser l'intellect du Grand Méchant Vraiment Méchant. Les joueurs
pourraient devenir paresseux si le sorcier local s'appelle Grillepain. (6)
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