[NdT 1: les Singes Macho de l’Espace
- allusion à Macho
Women With Guns] |
Soit une personne qui achète un jeu appelé Macho Monkeys…in
space ([NdT1] MMiS! en abrégé). Il lit le chapitre de l’histoire
et il l’aime, il lit le chapitre sur le contexte, il l’aime, il lit le
chapitre sur les règles … et il ne l’aime pas. Cette personne a alors le
choix entre trois options : (1) Prendre son système de JdR préféré, et y
convertir le contexte de MMiS !; (2) aller sur Internet poster sur son
forum préféré « quelles règles
pour MMiS! ? » ; ou (3) reposer MMiS! Sur l’étagère
et l’oublier pour toujours.
Pour l’option (1), le rôliste connaît déjà son système favori de pied en
cap ainsi il fait sa propre conversion. Il change les noms des compétences et
des caractéristiques, peut-être augmentera-t-il les dommages causés par les
armes et il s’arrêtera là. C’est l’option la plus consommatrice en
temps. Cela demande beaucoup de travail, mais c’est une possibilité.
Pour l’option (2), le rôliste demande à d’autres joueurs. C’est là qu’habituellement
nous rencontrons un problème. Ce dernier est endémique à tous les médias. Il
survient lorsque les gens regardent l’emballage et non le produit.
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[NdT2 clin d’oeil à Big
Eyes Small Mouth (BESM), un JdR manga générique]
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Réponse 1 : MMiS! n’est-ce
pas un jeu sur les singes ? Utilise donc Big ears, Red Asses
[NdT2]
Ouais, d’accord, BERA est bourré d’images de
singes, et on a une bibliographie qui liste tous les livres de Diane Fossey. Mais, qu’en est-il exactement du
système ? Est-il taillé pour jouer un singe ou est-ce juste que les
compétences ont des noms comme « babouinerie », « tactiques de gorille »,
et « faire le singe » ? Si vous retirez le vernis, vous verrez un système
avec ses propres ensembles de ratios, de probabilités, et un liant entre les
différentes parties du système. Le tout est présenté comme étant « le » JdR
sur les singes … mais c’est juste un JdR.
Réponse 2 : Peu importe. Utilise le D20. Tu
peux utiliser le D20 pour n’importe quoi.
Il y a toujours ce genre de type. C’est sa réponse à tout, et,
finalement, ce n’est pas tellement inapproprié si vous recherchez un système
neutre. Attention, je ne dis pas que c’est un mauvais système mais juste que
comme beaucoup d’autres systèmes, il agit comme un arbitre durant un débat.
« D’accord, Paladin Joe, ton attaque passe. Maîtresse Xanana, ton sort a
échoué. Paco Levoleur, tu as fait les poches du nain. »
[Le système D20] est indifférent, mais il fait ce pour quoi il est fait. Si
vous appréciez son fonctionnement, c’est super. Mais cela n’en fait pas un
« système parfait » pour un genre ou un contexte particulier, juste votre
système parfait.
Réponse 3 : Hé, qu’est-ce qui ne
va pas avec MMiS! ?
Houla ! rien. J’en parle juste comme ça.
Le revers de la médaille
Une autre personne prend un exemplaire de MMiS ! deuxième édition
dans le « bac des occasions » au magasin du coin « les JdR du Nid de la
Wyverne & le Grand Magasin de la BD ». Il lit le chapitre de l’histoire
et hausse les épaules, il lit le chapitre du contexte et bâille ; il lit les
règles … et il adore ! Pourquoi ? Parce qu’il aime le système. Avec ceci
à l’esprit, il entreprend de convertir son contexte préféré (le classique
cowboy-horreur, Le Six-coups de Cthulhu) à MMiS! 2ème éd. Il y
a des chances qu’il convertisse tous les futurs univers qu’il trouvera à MMiS
! 2ème éd.
Un jeu en deux parties
Votre livre de JdR moyen comprend un contexte et un système. Si vous le
prenez, que vous changez le contexte et que vous modifiez les caractéristiques
et les compétences via un thésaurus,
vous avez un nouveau jeu. Cependant, regardez le système et vous verrez qu’il
n’a pas changé.
Changez les détails du contexte mais gardez le système comme il est et vous
obtenez un nouveau JdR. Mais à nouveau, regardez le système. Rien d’important
n’a changé. Dans chaque cas, le système est générique.
En définitive, gardez les détails du contexte et greffez un système
entièrement différent. Oh regardez, cela fonctionne encore mais cette fois, c’est
le décor qui est générique. Vous pouvez faire ça toute la journée.
(Certains le font. On les appelle « créateurs de JdR »). Savez-vous ce que
cela signifie ? Vous le devinez : la plupart des JdR sont génériques.
Cependant les JdR peuvent être différenciés par leurs prémisses. Il y a l’idée
de base du contexte et il y a aussi le principe du système. La plupart des
livres de JdR choisissent un contexte avec une prémisse forte,
détaillée en données fictives et en données historiques, mais la recouvrent
d’un système mou qu’ils ont délaissé. Un système avec une prémisse
pourrait par exemple disposer les événements dans un ordre donné et
contraindre certaines actions durant l’histoire. En d’autres termes, c’est
un système avec un but.
Quand seulement un des deux a une prémisse forte, l'autre composant sera
générique.
Quand le système et le contexte ont tous les deux des prémisses fortes et
identiques (ou au moins complémentaires), vous commencez à vous éloigner du
générique.
Quand tous les deux ont des prémisses fortes mais en conflit, vous obtenez
une pagaille et vous devez décider lequel des deux prédominera pour jouer. En
général on bazarde la prémisse de l’univers alors que le système cherche
à tout prix à avancer, même laborieusement.
Quand aucun n’a de prémisse forte, vous avez obtenu un état
véritablement générique.
La prédominance du système
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[NdT3 HERO
est un
système générique très complexe où la création de personnage est très
longue ; le JdR générique TWERP
tient sur 4 pages, et il n’y a qu’une
seule caractéristique] |
Les gens posent toujours des questions comme : « Quel système dois-je
utiliser pour combattre des clercs dinosaures robotiques ? » Cela revient à
déterminer la quantité de travail qu’ils devront effectuer pour modifier un
système existant (ajouter des termes robotiques à un contexte sur l’affrontement
des clercs dinosaures dans l’ouest sauvage). Cela revient aussi à savoir si
les gens préfèrent les jeux simples ou compliqués. Auquel cas, ils pourraient
poser des questions plus précises comme « comment puis-je faire cela en
utilisant HERO ? » ou « comment
faire cela en utilisant TWERP
? [NdT3] » Mais tout revient finalement -qu’ils en aient conscience ou
non- à savoir s’ils apprécient la prémisse du système ou non.
La prémisse d’un système se base sur des dogmes. Cela peut être que
toutes les actions ont une probabilité d’échec de 43%. Cela pourrait être l’axiome
que le charisme (ou la Personnalité, le Charme, la Présence) est l’aptitude
la plus utile dans une fusillade. Ou encore le principe que tout peut être
résolu avec un seul dé. Ce pourrait être la croyance que la voie de l’illumination
est pavée de cadavres d’orcs pilleurs de caravanes.
Quoiqu’il en soit, c’est une prémisse et en tant que rôliste vous avez
besoin de décider ce que vous recherchez dans les principes d’un système.
Parfois il est difficile de quantifier ce que vous appréciez. Cela pourrait
simplement consister dans le fait que les revolvers sont mortels ou que la
cybernétique rend fou. Des fois c’est plus évident, et vous appréciez que
chaque évènement est amené d’une manière spectaculaire ou que vous avez
plus de bonus en ajoutant des idées excitantes plutôt qu’en mettant en
œuvre une stratégie de combat.
Les lieux, les gens
Parfois le contexte a une prémisse ; mais si le système ne
la soutient pas, il revient aux joueurs (d’accord, soyons honnêtes, plutôt
au maître de jeu) d’évoquer les thèmes et de pousser les personnages à
agir en accord avec la prémisse. Il y a des joueurs qui préfèrent cela,
pensez-y. On doit reconnaître qu’ils peuvent flatter le maître de jeu dans
ce type de scénario, et que cela peut se terminer pour les joueurs par la
course aux récompenses et la résolution d’énigmes. Le tout n'étant pas si
différent d’un jeu vidéo.
Si l’univers n’a pas de prémisse mais que le système en
possède une, les choses sont encore fonctionnelles.
Cependant, si la prémisse de l’univers fonctionne en
tandem avec celle du système, les choses fonctionnent admirablement.
Allons maintenant plus loin
Certains JdR décrivent de vastes royaumes, des stations
spatiales à la périphérie de l’espace [connu], et la botanique
extra-terrestre en grand détails, depuis un compte rendu complet des acariens
dans la poussière des maisons jusqu’aux géants à 100 bras qui patrouillent
les landes glacées de Béronie. Mais ils ne font pas vraiment quelque chose.
Ils vous donnent des lieux et des choses à découvrir, si vous le voulez, et
des races et des cultures à piller et combattre, si vous le souhaitez. Mais ils
ne vous poussent pas à l’action. Vous pouvez vous asseoir au bar, boire une
bière, et faire des gestes indélicats à la serveuse toute la journée. Ces
jeux sont des univers avec un système.
Et puis, il y a des JdR qui ont des étapes déterminées. Premièrement,
vous faites cela, ensuite vous faites cela, et ainsi de suite. Ils ont une
structure de jeu rigide de sorte que si vous jouez à ce JdR, vous devez aussi y
adhérer. Certains JdR ajoutent ou remplacent la structure de la partie par les
interactions sociales entre les joueurs. Ces jeux sont un système avec un
univers.
Un argument générique
Il n’y a actuellement que très peu de systèmes non génériques.
Si vous prenez votre livre de JdR habituel et que vous sautez au chapitre sur
les règles, vous trouverez probablement des caractéristiques, des
compétences, des armes, des armures, et un ou plusieurs mécanismes avec des
dés. Les noms de ces éléments pourraient être différents. Ils pourraient
même refléter le scénario fourni ou le genre : les caractéristiques d’un
JdR d’Horreur pourraient être la Peur, la Volonté, la Santé Mentale ; pour
un JdR de Western elles pourraient être la Verve, le Tempérament et le Souffle
; et pour un jeu de Fantasy ce pourrait être la Bravoure, la Magie, et la
Sagesse. Ces dénominations ne sont pas exclusives à un genre, mais le genre
choisi les influence, dans le sens où elles permettent d’avoir à l’esprit
le ton et la sensation du genre auquel on les a rajouté. Mais ce sont juste des
noms, et si vous regardez au-delà, si vous regardez en fait le système sur
lequel elles reposent, vous n’avez généralement tout compte fait qu’une
certaine manière de déterminer « oui », « non », et «en gros». Généralement,
mais pas toujours.
Cela ne rend pas un JdR mauvais. Mais, en tant que rôlistes, nous devrions
être conscients de ce que nous achetons vraiment, et pouvoir assumer la
diversité de nos goûts. Certaines personnes préfèrent des systèmes peu
envahissants, à la « prémisse libre » combinés à un contexte à la
prémisse dirigiste.
D’autres préfèrent des univers à la « prémisse libre » avec un
système à prémisse dirigiste ; et d’autres encore ont besoin que les deux
aspects aient une prémisse libre ou une prémisse dirigiste. Eh, peu importe,
du moment que chacun à la table est au diapason et s’amuse, alors cela veut
dire que ce JdR fonctionne bien.
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